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De mémoire de confiné

On aura tout entendu sur cette pandémie au cours de ces deux derniers mois ; je veux parler bien sûr du dénommé Covid 19, qui nous a pris à la gorge dès les premiers jours de 2020. Il suffisait en effet d’ouvrir n’importe quel programme de télévision, en n’importe quelle langue ; du matin jusqu’au soir, Coronavirus était l’unique sujet. Une avalanche de chiffres s’abattait sur nos écrans et dans nos oreilles : nombre de nouveaux contaminés, par villes, par départements, régions, états, pays, continents… statistiques en tout genre, faisant état du nombre d’hospitalisations, des traitements de réanimation, des guérisons, et surtout des … décès ; chacun de ces éléments étant comparé homothétiquement à ceux du jour, de la semaine, de la quinzaine, du mois précédents… Et quelle profusion de tableaux, de graphiques, de courbes n’avons-nous pas vus, illustrant l’inexorable progression de la maladie sur toute la surface de notre chère Terre…

 

« Au cœur du Virus »

DE MÉMOIRE DE CONFINÉ

Sculpture en pierre du Puy-en-Velay

Yves Mercier

Pourtant, il me semble que nous avons passé sous silence bien des aspects de ce moment particulier du confinement, imposé par les plus hautes autorités de l’État et de la Science, que chacun vivait à sa manière.

Pour ma part, je n’oserais pas dire, et encore moins écrire, que ce fut un moment merveilleux de ma vie. Non, fichtre non ! Mais passés les premiers jours de ce nouvel art de vivre, voilà que je me suis surpris à apprécier bien des aspects de ma nouvelle condition. Avant que cela n’arrive, j’avais un agenda très chargé, de rendez-vous, de sorties, de visites, de rencontres, qui toutes me semblaient être de première importance. Et voilà que d’un seul coup d’un seul, tout était tombé à l’eau ; je n’avais plus qu’à effacer tout cela de mon calendrier ! … Je dois avouer qu’après quelques timides mouvements de mauvaise humeur, je découvrais que progressivement je prenais goût à ce nouvel Espace – Temps ; preuve que tous ces rendez-vous et autres rencontres n’étaient pas aussi importants que ça ! …

Il faut dire qu’en matière d’espace, nous n’étions pas à plaindre : les quelques milliers de mètres carrés du parc dans lequel est implantée notre maison assuraient allègrement notre compte d’oxygène, et nous permettaient les 1 à 2 km de marche quotidienne nécessaires pour rester en bonne forme physique. Quant au temps disponible, c’était comme une sorte de retraite méditative dans laquelle j’avais depuis longtemps pris l’habitude de me complaire, et de me distraire à coups de lecture, de musique, et de poésie.

Mais nous n’étions pas seuls au monde ; toute la planète souffrait terriblement, et les petits applaudissements dispensés chaque soir à l’adresse des soignants étaient bien peu de choses par rapport aux immenses efforts déployés par cette catégorie de travailleurs qui eux-mêmes n’avaient pas droit au repos des confinés. Et puis il y avait ces malades atteints du virus, qui souffraient le martyre en attendant d’être guéris ou bien… de mourir.

Mais comme beaucoup de choses de la destinée humaine, tout n’était pas noir, et il y avait une certaine chance que la vie reste belle. Dans ce registre, je voudrais citer quelques exemples peut-être porteurs d’espérance :

D’abord, il y eut – pour une fois – de la part des citoyens, un certain consensus sur les décisions prises en haut lieu. Certes, il y eut bien quelques couacs, mais ils ne furent pas très nombreux. Et puis il y eut des images télévisées porteuses de sens, qui à elles seules, en disaient plus que tous les discours sur les désastres de la pollution en tout genre que nous avions nous-mêmes fabriqués. Les plus évocatrices furent certainement celles de notre atmosphère terrestre vue de l’espace : la photographie prise avant la pandémie, et la même prise après le confinement, ne laissaient aucun doute sur le fait que ce dernier avait réduit dans d’énormes proportions l’impact des gaz à effet de serre.

Un autre constat, dont on parla peu, et dont on parle peu encore maintenant, à mon niveau de simple citoyen, me frappa fortement : nous étions au printemps, la période bénie où la nature s’éveille et marque le départ de la belle saison. Or, le parc qui entoure notre maison dans laquelle nous vivons depuis plus de 50 ans, n’avait jamais, au grand jamais, affiché une telle exubérance, une telle vigueur, un tel accomplissement de beauté, qu’à l’issue de ce printemps 2020 ! Les oiseaux n’étaient pas en reste ; ils sifflaient, ils chantaient à tue-tête, ils se baignaient bruyamment en faisant leurs ablutions dans la fontaine.

Mais plus encore, ce qui vient d’être dit s’appliquait aussi indiscutablement à toute la nature, à toutes nos régions ; et, nous le devinions, à la planète entière. Visiblement, la nature avait repris tous ses droits… qu’elle n’aurait jamais dû perdre… Et nous sentions, un peu confusément peut-être, mais sans l’ombre d’un doute, que l’ensemble du genre humain, s’il voulait bien garder une part des principes qu’il venait d’adopter à son corps défendant, bénéficierait lui aussi de l’embellie universelle dont il prendrait sa part.

Telles étaient mes conclusions – provisoires peut-être – issues de cet épisode tout à fait extraordinaire, et plein d’enseignements à ne pas oublier…

 

Léo GANTELET

25 mai 2020